Comprendre la Fresque de la Mobilité : un atelier ludique pour repenser nos déplacements

Introduction

Les fresques pédagogiques connaissent un essor fulgurant ces dernières années, devenant des outils incontournables de sensibilisation aux grands enjeux sociétaux et environnementaux. La Fresque de l’économie circulaire, la Fresque de la Biodiversité, la Fresque de la RSE ou encore la Fresque de la Diversité sont autant d’ateliers collaboratifs qui mobilisent des milliers de citoyens, salariés, étudiants et élus autour de problématiques cruciales. Dans cette dynamique, la Fresque de la Mobilité se distingue en abordant un pilier fondamental de la transition écologique : nos déplacements.

Alors que le secteur des transports représente le premier poste d’émission de gaz à effet de serre (GES) en France, il devient indispensable de repenser en profondeur notre rapport à la mobilité. Cet article vous propose de comprendre le fonctionnement de la Fresque de la Mobilité, son intérêt, ses apports concrets et la manière dont elle peut s’intégrer dans une stratégie plus large de transformation durable.

1. Qu’est-ce que la Fresque de la Mobilité ?

1.1 Un atelier pédagogique participatif pour sensibiliser aux impacts de nos déplacements

La Fresque de la Mobilité est un atelier collaboratif conçu pour sensibiliser aux enjeux environnementaux, sociaux et économiques liés à nos modes de déplacement. Créée en 2020 par des bénévoles du collectif Les Shifters (proche du Shift Project), elle s’adresse à tous les publics – citoyens, entreprises, collectivités, établissements scolaires – dans le but de favoriser une prise de conscience collective et d’engager l’action.

À travers des outils ludiques et une démarche participative, les participants découvrent les impacts systémiques de la mobilité : émissions de CO₂, congestion urbaine, inégalités d’accès, dépendance énergétique, artificialisation des sols, etc. et cherche des alternatives ensemble grâce à l’intelligence collective.

1.2 Les grandes étapes de l’atelier

L’atelier se déroule en trois temps principaux, sur une durée moyenne de trois heures :

1. Phase de réflexion et de mise en lien des cartes : les participants reçoivent une série de cartes illustrant les enjeux et déterminants de la mobilité. Par petits groupes, ils établissent des liens de causalité et structurent une fresque collective, créant ainsi une vision systémique.

   
   

2. Phase de débrief collectif : un échange animé permet de partager les ressentis, d’analyser les leviers d’action, et d’aborder les réalités territoriales.

   
   

3. Phase d'engagement : les participants sont invités à imaginer des actions concrètes, individuelles ou collectives, pour améliorer la mobilité de leur organisation ou territoire.

1.3 Quelle est la particularité de la technique de la Fresque ?

La Fresque de la Mobilité s’appuie sur une pédagogie active et collaborative. Elle mobilise l’intelligence collective, encourage le dialogue et favorise une immersion émotionnelle forte. Cette méthode est basée sur l’approche systémique : chaque carte est un élément d’un écosystème global, ce qui permet de visualiser l’interconnexion entre les comportements individuels et les effets collectifs.

L’aspect ludique et visuel facilite l’appropriation du sujet par tous, quel que soit le niveau de connaissance initial.

2. Pourquoi repenser la mobilité est crucial aujourd’hui ?

2.1 Le transport, premier secteur émetteur de gaz à effet de serre

En France, le transport représente 31 % des émissions nationales de gaz à effet de serre, selon les données du ministère de la Transition écologique. La majorité de ces émissions provient de la voiture individuelle, très majoritairement thermique, qui reste le moyen de transport principal pour 74 % des actifs.

Les zones rurales et périurbaines sont particulièrement touchées par la dépendance à la voiture du fait du manque d’alternatives accessibles. À cela s’ajoutent des problématiques de congestion dans les grandes métropoles, une exposition accrue à la pollution de l’air, des inégalités d’accès à l’emploi et aux services, et un coût économique élevé pour les ménages.

2.2 Les impacts cachés de la mobilité

Au-delà des émissions de GES, la mobilité génère d’autres effets délétères :

• Pollution atmosphérique : responsable de plus de 40 000 décès prématurés par an en France (source : Santé Publique France).

  
  

• Artificialisation des sols : développement des infrastructures routières et parkings qui accentuent les problématiques d’inondation, de pollution des sols via les pluies ou encore de l’augmentation de la chaleur au sol.

  
  

• Accidents de la route : environ 3 000 morts par an en France.

  
  

• Exclusion sociale : 15 % des Français déclarent avoir renoncé à un emploi ou une formation par manque de solution de transport.

2.3 Le levier de la sobriété et des alternatives durables

La transition vers une mobilité durable repose sur trois axes majeurs :

• Réduire les besoins en déplacement :

  L’atelier met en avant l’importance du télétravail, de la proximité des services et d’un urbanisme de proximité pour limiter les trajets superflus. Les animateurs racontent comment des études montrent que favoriser des services accessibles à pied ou à vélo peut réduire significativement la demande de mobilité motorisée.

  
  

• Basculer vers des modes moins carbonés :

  La marche, le vélo, les transports en commun ou le covoiturage sont présentés dans la pyramide de la mobilité comme les solutions les plus sobres. L’atelier permet d’illustrer leur impact avec des ordres de grandeur : par exemple, la marche et le vélo sont systématiquement positionnés en haut de la hiérarchie, tandis que les voitures individuelles occupent le bas.

  
  

• Optimiser les usages motorisés restants :

  Pour les déplacements encore motorisés, l’option d’un véhicule électrique ou mutualisé est examinée. La Fresque souligne que, même si la voiture électrique a un coût environnemental à sa fabrication, elle reste plus écologique que la thermique sur le long terme. La mutualisation de véhicules et la gestion dynamique des flottes permettent aussi d’optimiser les usages pour réduire les émissions globales.

  
  

La Fresque de la Mobilité rend visible cette hiérarchie d’actions, souvent appelée pyramide de la mobilité, en invitant les participants à classer et visualiser les leviers existants selon leur efficacité carbone et leur applicabilité à différentes échelles (citoyenne, entreprise, territoire)

3. La Fresque de la Mobilité en pratique : pour qui, comment, pourquoi ?

3.1 Quels publics peuvent organiser ou participer ?

L’atelier est ouvert à tous et peut être décliné selon les contextes :

• Entreprises : dans le cadre d’un plan de mobilité employeur, pour améliorer les trajets domicile-travail, réduire les frais kilométriques ou renforcer la QVT.

  
  

• Collectivités : comme outil de concertation citoyenne, animation de PCAET, élaboration de schémas de mobilité active.

  
  

• Établissements scolaires et universités : pour sensibiliser les jeunes générations aux enjeux de durabilité.

  
  

• Associations et citoyens : pour animer des événements de quartier, forums ou festivals autour du climat.

3.2 Comment se déroule un atelier ?

Un atelier dure en moyenne 2h30 à 3h, se déroule en groupe de 4 à 8 personnes, et est animé par une personne formée. Les supports incluent :

• 40 cartes à disposer sur une fresque vierge.

• Un tableau pour synthétiser les impacts.

• Un guide d’animation et des fiches de réflexion.

• Des moments interactifs de partage et d’expression.

L’animation peut se faire en présentiel ou à distance, et des formats adaptés existent pour les publics jeunes ou les professionnels avec un temps limité.

3.3 Quels bénéfices pour les participants ?

Participer à la Fresque de la Mobilité permet de :

• Comprendre concrètement les mécanismes qui sous-tendent les choix de mobilité.

  
  

• Prendre conscience de ses propres leviers d’action, que ce soit en tant que citoyen, salarié ou décideur.

  
  

• Favoriser la cohésion d’équipe et l’intelligence collective autour d’un enjeu transversal.

  
  

• Déclencher des actions concrètes, comme :

  • Mettre en place une flotte de vélos partagés pour les trajets professionnels.

  • Instaurer un forfait mobilité durable pour les salariés.

  • Encourager le télétravail ou les horaires décalés pour lisser les pics de trafic.

  • Repenser le site ou l’événementiel pour limiter les déplacements contraints.

  • Sensibiliser à l’écoconduite pour les utilisateurs de véhicules thermiques ou hybrides.

Ces actions peuvent ensuite s’intégrer dans une démarche de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) ou un plan climat territorial.

5. Intégrer la Fresque de la Mobilité dans une démarche plus large de transition

5.1 Comment la Fresque s’inscrit dans les plans de mobilité durable ?

L’atelier trouve sa place dans plusieurs dispositifs stratégiques du cadre français de la planification durable :

• Plans de Mobilité Employeur (PDM ou PDME) : Dans toutes les entreprises rassemblant plus de 50 salariés sur un même site, situées dans une agglomération de plus de 100 000 habitants, l’employeur doit élaborer un plan de mobilité. Ce document vise à optimiser les déplacements professionnels et domicile‑travail via un diagnostic des trajets, suivi d’un plan d’actions encourageant le covoiturage, les mobilités actives (vélo, marche), le télétravail ou l’autopartage. L’atelier Fresque sert de base à l’identification participative de leviers durables réalistes à inclure dans ce plan.

  
  

• PCAET (Plan Climat Air Énergie Territorial) : Ce plan, obligatoire pour toutes les intercommunalités de plus de 20 000 habitants, structure une politique cohérente autour du climat, de la qualité de l’air et de l’énergie. Il comprend un diagnostic territorial, une stratégie chiffrée, un programme d’actions opérationnel et un suivi des résultats. La Fresque peut être utilisée pour co-construire avec les parties prenantes les leviers de mobilité à intégrer, dans une logique de cohérence entre les actions du territoire et la pyramide de la mobilité.

  
  

• Schémas directeurs cyclables / politiques de covoiturage : Ces schémas définissent les axes cyclables prioritaires et les zones à encourager pour le covoiturage sur un territoire. L’atelier Fresque peut alimenter ces stratégies en visualisant les bénéfices carbone ou santé de solutions comme les voies vélo séparées ou les applications de covoiturage inter-entreprises, en les plaçant dans la hiérarchie des modes de transport selon leur efficacité.

  
  

• ZFE-m (Zones à Faibles Émissions mobilité) : Ces zones interdisent ou restreignent l’accès aux véhicules les plus polluants dans certaines zones urbaines. La Fresque précise leur rôle dans la pyramide de la mobilité, en illustrant comment la mise en place d’une ZFE-m encourage les alternatives durables (transports en commun, vélo, marche) tout en réduisant les usages motorisés les plus polluants.

  
  

Exemples en entreprise, plusieurs organismes ont mis en place des actions concrètes :

• SGS a déployé un plan de mobilité sur plusieurs sites, encourageant le télétravail et le vélo : des vélos sont mis à disposition pendant la pause déjeuner, et l’achat de VAE est subventionné à 200 €, soit 40 % de réduction sur le prix public.

  
  

• Cdiscount, à Bordeaux, ambitionne que 70 % de ses collaborateurs adoptent des mobilités durables pour les trajets domicile‑travail. L’entreprise a négocié l’amélioration du service de transports publics avec la métropole pour répondre à cette ambition.

  
  

• Schneider Electric propose des solutions d’auto‑partage internes afin de réduire l’usage de voitures individuelles et de mutualiser les ressources tout en cohérence avec sa politique environnementale.

  
  

Ces cas concrets démontrent que les dispositifs comme le Forfait Mobilités Durables sont efficacement utilisés pour promouvoir les mobilités alternatives telles que le covoiturage, le vélo et les transports partagés. Ces solutions répondent à la législation française (loi LOM), tout en étant exonérées de charges sociales, plafonnées à 400 € par an, voire 800 € selon les usages.

5.2 Liens avec d’autres fresques existantes

La Fresque de la Mobilité est souvent utilisée en complément d’autres ateliers :

• Fresque du Climat : pour comprendre l’impact des transports sur le climat global.

• Fresque de la Ville : pour aborder les liens entre urbanisme et mobilité.

• Fresque de la RSE : pour l’inscrire dans une stratégie plus large d’entreprise responsable.

Créer des parcours de fresques permet de construire une culture de la transition cohérente, progressive et motivante.

Conclusion

Face à l’urgence climatique, à la hausse des émissions du secteur des transports (qui représente encore près de 30 % des émissions de gaz à effet de serre en France, selon le Ministère de la Transition écologique), et à la nécessité de repenser nos modes de vie, la Fresque de la Mobilité s’impose comme un outil d’intelligence collective accessible, concret et transformateur. Elle ne se contente pas de sensibiliser de manière descendante : elle engage les participants à réfléchir ensemble, à hiérarchiser les solutions, à comprendre les ordres de grandeur, et surtout à identifier les leviers d’action adaptés à leur contexte.

Que l’on soit citoyen, élu local, salarié, responsable RH ou acteur du changement, l’atelier offre un cadre structurant pour passer de la prise de conscience à l’engagement, du diagnostic à l’action. Intégrée à des démarches comme les Plans de Mobilité Employeur, les PCAET ou les politiques de mobilité urbaine, la Fresque devient un catalyseur pour une transition plus systémique, fondée sur la sobriété, l’équité et l’intelligence collective.

La transformation de nos modes de déplacement n’est pas un renoncement : c’est une opportunité de construire des territoires plus agréables à vivre, de retrouver du temps, du lien social et de la résilience face aux chocs à venir.

🚲​​ Et vous, êtes-vous prêt à embarquer vers une mobilité plus sobre, plus collective, et surtout plus désirable ?

QUESTIONS FRÉQUENTES

Qu’est-ce que la Fresque de la Mobilité ?

Un atelier collaboratif qui sensibilise aux impacts environnementaux, économiques et sociaux de nos déplacements, et aide à trouver des solutions concrètes pour une mobilité plus durable.

À qui s’adresse-t-elle ?

Aux entreprises, collectivités, écoles et citoyens souhaitant comprendre et agir sur la transition écologique des transports.

Comment se déroule l’atelier ?

En 2h30 à 3h, les participants construisent une fresque collective, échangent sur les enjeux, puis identifient des actions concrètes adaptées à leur contexte.

Quels sont ses objectifs ?

Réduire l’empreinte carbone des déplacements, promouvoir des alternatives sobres et renforcer la cohésion autour des enjeux de mobilité durable.

Sources

• ADEME – Mise en place d’un Plan de Mobilité Employeur

• ADEME – Plan Climat-Air-Énergie Territorial (PCAET)

• ADEME – Transports et mobilité durable

• Commission européenne – Semaine européenne de la mobilité

• Construction21 – Fresque de la Mobilité : comprendre pour agir

• Déclic Mobilités – Présentation de la Fresque de la Mobilité

• Edenred – Faciliter les trajets des salariés : 3 exemples d’entreprises qui agissent

• EM Services – Sensibilisation à la mobilité durable avec la Fresque

• EmployeurProVélo – Plan de mobilité employeur : définition et mise en œuvre

• Entreprendre.Service-Public.fr – Plan de mobilité employeur (PDM)

• FRESKR – Trouver un animateur

• Fresque de la Mobilité – Site officiel

• Ministère de la Transition écologique – Chiffres clés du climat – Édition 2024

• Santé Publique France – Pollution de l’air et santé

• Shift Project / Les Shifters – Mobilité et décarbonation

• Virage Énergie – Fresque des Mobilités : outil de transition

• Wikipedia – Plan climat-air-énergie territorial (PCAET)